Le design thinking est une approche de résolution de problèmes largement utilisée dans les stratégie d'innovation.
Elle se décompose en cinq phases distinctes qui guident le processus de conception : l'empathie, la définition, l'idéation, le prototypage et le test.
Dans cet article, nous allons voir comment SOS Villages d’Enfants International a utilisé le Design Thinking pour trouver des solutions innovatrices, afin de digitaliser ses processus.
Qui est SOS Villages d’Enfants International
Il s’agit d’une organisation internationale non-gouvernementale, dont la raison d’être est d’améliorer la vie des enfants et des familles à risque dans 136 pays et territoires dans le monde entier, et d’apporter des changements dans les communautés où ils travaillent.
Sa mission est de construire des familles pour les enfants dans le besoin, les aidons à façonner leur propre avenir et participer au développement de leurs communautés.
Dans chacun des pays où SOS Villages d’enfants existe, il y a des programmes qui servent à accomplir cette mission.
Nous allons nous intéresser uniquement à 2 types de programmes qui ont une relation avec notre étude de cas.
La prise en charge familiale
Afin de construire des familles d'accueil pour les enfants, SOS Villages d’Enfants a inventé le concept de « village », qui est un ensemble de maisons dans lesquelles les enfants qui ont perdu la prise en charge familiale sont recueillis en bas-âge, et sont invités à vivre auprès d’une mère (ou père) adoptive professionnelle.
Dans chaque maison, évolue un groupe d’enfants grandissant ensemble et cultivant des liens de fraternité inaliénables.
Le renforcement de la famille
Parce que le meilleur endroit pour un enfant est dans sa famille biologique, SOS Villages d’enfants fait aussi de la prévention.
En effet, elle travaille avec des familles vulnérables afin de les aider à se développer et à dépasser leurs difficultés.
Le but ultime de ce programme est la prévention de l’éclatement de la famille et la perte de la prise en charge familiale de l’enfant.
Le Design Thinking Process
Dans le cadre de sa stratégie de digitalisation, le département informatique au sein de l’organisation cherchait des moyens pour exploiter la puissance de la technologie pour un meilleur impact.
1) L’inspiration
À l’occasion de la révision de la stratégie 2030 de SOS Villages d’Enfants International, et consciente que la technologie numérique a commencé à changer le destin des enfants et leurs chances dans la vie, SOS a voulu exploiter ce changement de la meilleure manière afin de donner encore plus de moyens à ces enfants.
C'est pourquoi SOS Villages d'enfants examine le potentiel de la numérisation dans la zone du programme afin de l'ancrer dans sa "Stratégie SOS 2030" actualisée.
En partenariat avec Accenture Developement Partnerships et Nethope, SOS Villages d’Enfants International a organisé un workshop de 2 jours, en utilisant un concept baptisé DDD (Dream, Design, Deliver) qu’on peut traduire en français en RCI (Rêver, Concevoir, Implémenter), qui est un accélérateur d’impact social développé par Microsoft.
Lors de ce workshop, SOS Village envisage de nouveaux concepts, évalue leur faisabilité, leur impact et leurs coûts potentiels et crée des feuilles de route de haut niveau pour leur mise en œuvre.
À la fin de l'atelier, les idées retenues sont présentées aux dirigeants afin de préparer une décision sur la conception technique et la mise en œuvre du projet.
2) L’empathie
Afin de bien réussir la phase de l’empathie, les organisateurs du workshop ont invité, non seulement, des professionnels de la technologie, mais aussi des professionnels des programmes de différentes compétences, responsabilités et spécialisations. Ainsi que des personnes du top management et des jeunes lauréats de SOS Villages d’Enfants.
Le but étant d’aborder les problématiques de tous les points de vue, et bien sûr avoir des représentants des utilisateurs finaux dans la salle.
Par le billet des discussions et d’entretiens avec les participants, notamment les utilisateurs, l’équipe s’est concentrée sur les défis auxquels ils pouvaient répondre, et avait envisagé quatre Personna pour donner aux collaborateurs de la prise en charge (mamans SOS et éducateurs) et aux travailleurs sociaux, la confiance, les compétences, le mentorat et la vision dont ils ont besoin.
Nous allons nous attarder sur une seule personna :
Mère SOS : Purnima
- 30 ans qui vit au Sri Lanka
- Elle s'occupe des enfants qui ont perdu la prise en charge parentale
Ce qu'elle ressent
Purnima estime qu'elle doit développer ses compétences parentales pour mieux s'occuper de ses jeunes adolescents.
En outre, elle aimerait savoir comment mieux répondre aux besoins des enfants qui souffrent de traumatisme. Elle a besoin d'aide pour savoir comment développer ses compétences.
Ce qu'elle pense
Elle veut mieux s'occuper de ses enfants et soutenir ses adolescents. Elle souhaite donc en apprendre davantage sur la manière de procéder.
Les informations qu'elle reçoit ne sont pas toujours pertinentes et ne répondent pas à tous les besoins.
Elle veut accéder à des contenus pour trouver des solutions aux problèmes liés à la prise en charge alternative, à l'aide à la jeunesse, à l'éducation ou à l'employabilité.
Ce qu'elle fait
Purnima a reçu une formation lorsqu'elle est devenue mère SOS et va maintenant dans un centre de formation tous les 1 à 2 ans.
Le centre de formation est éloigné de l'endroit où elle vit (dans une autre ville), elle doit donc se déplacer pendant une journée entière et laisser les enfants avec une tante (Remplaçante de la mère SOS) pendant une semaine entière que dure la formation.
Ses attentes
- Interactions significatives avec les pairs
- Rencontrer d'autres mères et partager les défis
- Échange d'informations entre pairs
- Sortir pour des besoins personnels
- Réactions positives des enfants
- Les enfants mangent correctement, se comportent bien et jouent ensemble en toute tranquillité
- Les enfants obtiennent de bons résultats scolaires
- Les enfants (et elle-même) entretiennent de bonnes relations avec les parents biologiques des enfants.
3) La définition du problème
Une fois les personnas définis, il est temps de formuler les vraies questions qu’on cherche à résoudre.
Nous allons continuer toujours avec notre exemple de la maman Purnima, et nous allons définir les éléments clefs du problème, à savoir :
- L’utilisateur : Que vous pouvez définir grâce à une des techniques expliquées dans la phase empathie. Notamment le personna ou la carte d’empathie.
- Le besoin : Choisissez le ou les besoins les plus essentiels de l’utilisateur.
- La découverte (Insight) : Convergez vos découvertes et synthétisez-les d’une manière à vous ouvrir des pistes de conception.
Notre utilisateur est bien la maman Purnima, dont la personna est illustrée ci-dessus.
Son besoin le plus essentiel est : Avoir des possibilités d'apprentissage et de développement continus pour pouvoir faire face aux difficultés des enfants et des jeunes.
La découverte :
- Prunima manque de connaissances pour répondre aux besoins individuels de certains enfants et jeunes (traumatismes, problèmes des adolescents, autonomie ...).
- Incapacité d'accéder au contenu concernant la formation et l'éducation des jeunes/des enfants
- Manque d'interactions avec les mères SOS et d'un mécanisme de soutien par les pairs.
- Le temps élevé de déplacement vers les centres de formation.
4) L’idéation
En partant du problème bien cadré, des groupes ont été formés afin de discuter et d’émettre le maximum d’idées.
En effet, pour les 4 problématiques retenues, plus de 100 idées ont été générées !
En 2 jours seulement c'est énorme, n’est-ce pas ?
Pour le problème de notre personna Prunima, une seule solution a été retenue :
La solution choisie a été baptisée Tante Annie.
Tante Annie est une assistante vocale qui fournit de multiples services aux mères SOS.
Tante Annie est une solution facilement pilotée par la voix, permettant aux mères SOS d'interagir facilement avec le dispositif.
Elle possède de nombreuses fonctionnalités centrées sur la vie de famille pour aider les mères SOS à :
- Obtenir les informations parentales dont elles ont besoin
- Développer des compétences pertinentes
- Planifier leurs journées et à interagir avec des personnes de confiance.
Le dispositif est associé à des capacités d'analyse (machine learning) qui peuvent améliorer la qualité du dialogue au fil du temps.
Le dispositif est destiné à faire partie de l'expérience professionnelle des mères SOS.
Bien entendu, la langue utilisée devra être la langue local de la mère SOS pour maximiser l'apprentissage.
5) Le prototype
Rappelez-vous que le prototypage en Design Thinking doit être simple, rapide et doit se faire à moindre coût.
SOS Villages d’Enfants a opté pour le Storyboarding pour prototyper la solution retenue au sein même du workshop.
Je vous rappelle que le storyboarding consiste à diviser votre idée en plus petits morceaux plus détaillés, qui illustreront votre utilisateur et le contexte dans lequel il a recours à votre solution
Ainsi, le scénario suivant a été réalisé :
- Purnima, une mère SOS, est débordée par de multiples activités et utilise Tante Annie tout en cuisinant.
Elle active l'appareil à l'aide d'une carte perforée, ce qui empêche les enfants dont elle s'occupe d'en faire un usage abusif. - Tante Annie agit comme un guichet unique qui fournit aux mères SOS des informations parentales juste à temps qui sont pertinentes pour les activités quotidiennes, ainsi que pour la formation continue et le développement des compétences.
- Purnima peut entendre des nouvelles personnalisées sur la région où elle vit, elle peut écouter des podcasts sur la santé, la nutrition et l'éducation.
Elle peut également communiquer par messages vocaux avec d'autres mères SOS qu'elle a ajoutées à son réseau de confiance. - En plus de cela, Tante Annie tient également à jour les calendriers des activités familiales comme les rendez-vous chez le médecin, les anniversaires, les visites parentales, etc.
C'est une fonction très importante pour Purnima pour organiser la vie de ses 8 enfants. - En arrière-plan, les experts en contenu pédagogique de SOS peuvent aussi apprendre davantage les types de questions fréquemment soulevées par les mères, les réponses "appréciées" et les lacunes en matière de contenu.
6) Les tests
Une fois le prototype réalisé et accepté par les utilisateurs et les participants du workshop, l’équipe a réalisé un autre prototype cliquable pour tester le concept sur le terrain avec plus d’utilisateurs finaux et dans des conditions réelles et affiner la solution.
Témoignage du DSI de SOS Villages d’Enfants International
Ci-après le témoignage de Thomas Rubatsher, DSI de SOS Villages d’Enfant International :
Dans notre atelier Dream Design, nous avons utilisé la démarche Design Thinking avec un large groupe de participants internationaux, afin de garantir l’approche orientée vers l'utilisateur et une réflexion créative hors des sentiers battus.
La méthodologie a répondu à nos attentes élevées. Non seulement nous avons développé des approches vraiment nouvelles et innovantes pour renforcer les capacités de nos collègues sur le terrain, mais nous avons aussi convaincu notre management d'investir un budget stratégique dans le développement de prototypes.
L'atelier était également très divertissant et a permis de maintenir le niveau d'énergie de tous les participants pendant deux longues journées.
Conclusion
Je souhaite très bon courage à SOS Villages d’Enfants dans l’implémentation de leurs 4 concepts, qui seront sans doute un succès et qui illustrent clairement l’impact positif que peut avoir la technologie sur la vie des individus.
J’espère que cette étude de cas a pu illustrer sans ambiguïté les 5 étapes du Design Thinking process.
Je serai très heureuse de lire et répondre à vos questions ou commentaires.